FLASH INFO 2 - un barbecue organisé, une jolie propagande

Un barbecue organisé dans le district 4, voilà ce que tu lisais à l'instant alors Leena était au boulot. Les lamas ne seraient peut être pas contre une petite promenade cela dit. A moins qu'ils ne soient déjà présent, au barbecue dans la viande qui allait être cuite. En voilà une idée qui te faisait marrer tout seul comme un grand. Une saucisse de lama, voilà ce qui allait se présenter à toi. Et irrémédiablement, c'est ce à quoi tu penserais pour ce barbecue. Tu ne savais pas si tu allais réussir à manger quoique ce soit à vrai dire. Mais en tout cas, tu te rendais sur place, histoire de tenter de te remplir la panse sans éclater de rire, parce que même si tu ne fais pas partie des plus pauvres, tu ne manges pas tous les jours un petit barbecue. Evidemment, tu en avais profité pour apporter avec toi une sublime bouteille de vin de France. Un bon barbecue se mange avec une bonne bouteille. Tu avais d'ailleurs décidé de te la siffler à toi tout seul, sauf si une âme charitable te faisait pitié, tu pourrais lui offrir un fond de verre, pour qu'il puisse tremper ses lèvres à l'intérieur. Il y avait donc déjà du monde, mais peu importe, tu te greffais près d'un plat de viande bien cuite, et tu sortais le tir bouchon pour ouvrir ta propre bouteille et déjà t'en servir un verre.

Il ne lui avait fallu que quelques minutes pour se frayer un chemin dans la foule et rejoindre le buffet déjà assiégé par d’autres. Comme partout ailleurs dans cette ville, dans ce monde sans doute, chacun vaquait à sa vie sans réellement se soucier des autres, mais il y avait un sentiment de bonne humeur aujourd’hui qui n’atteignait malheureusement pas James. Il s’interrogeait plutôt sur leurs capacités à tous à vivre leur vie sans jamais montrer la moindre trace d’une faille. Ou du moins, de ce qu’il pouvait en voir. Il récupéra une assiette en carton et évite de peu un trio près du buffet, un homme venant de débarquer pour attraper une jeune femme par le bras dans un geste qui lui semblait un peu violent, leur lançant un regard perplexe en les contournant. Peut-être aurait-il dû réagir ? Se mêler d’une histoire qui ne le regardait clairement pas, ne serait-ce que parce qu’à peine une seconde plus tôt, il s’était agacé de voir tant d’indifférence réunie au même endroit… Mais il ne valait pas mieux que les autres, n’est-ce pas ? Il était peut-être même pire que la plupart de ces gens, dans le fond…

Il était encore pleinement concentré sur cette pensée et les yeux toujours tournés vers ces trois personnes quand il parvint enfin à se frayer un chemin jusqu’à la table. Chose qu’il regretta profondément quand il releva le regard devant lui, dans la seule intention de trouver quelque chose pour nourrir Maya et qu’il perdit momentanément toute capacité à réfléchir, bouger ou juste respirer, son regard se posant sur quelqu’un qu’il aurait rêvé de ne jamais revoir. “Salut.” souffla-t-il, en réponse au piètre mot que lui envoya Marvin pour l’aborder, un sourire se dessinant immédiatement sur ses lèvres, à son plus grand désespoir. Il regarda derrière lui, cherchant Maya dans la foule en priant pour qu’elle soit restée dans son coin ou qu’elle ait rencontré quelqu’un avec qui parler. N’importe quoi du moment qu’elle ne s’approchait pas de lui maintenant. Que jamais, ô grand jamais, ni elle ni Marvin ne découvrait ce qu’il avait réellement fait ce soir-là. “Je ne pensais pas que t’étais le genre à venir à ces événements.” reprit-il en reportant son attention sur l’homme. Et aussitôt, ce foutu sourire qui revenait lui brûler les lèvres. Il avait envie de mourir, au moins autant qu’il rêvait que le reste du monde disparaisse pour qu’il ne reste plus que Marvin et lui. Rien de cela n’arriverait maintenant, hélas. Il se racla la gorge discrètement, à la recherche - désespérée - de quelque chose d’intelligent à dire et ses yeux s’emplirent d’horreur quand, à la place, il s’entendit ajouter : “Je suis content de te revoir.” Ce qui était peut-être vrai, réalisa-t-il après que les mots lui aient échappé, mais probablement pas la bonne chose à dire.

Ce foutu sourire… Il luttait pour le retenir, mais sentait déjà la douleur de cet échec. N’importe qui regardant vers eux à ce moment saurait aussi clairement que si James s’était soudainement mis à hurler à la foule combien il voulait cet homme. Et Marvin ne l’aidait pas. Avec ses mots, son propre sourire. Il se disait surprenant. James aurait voulu savoir si c’était vrai. Il aurait voulu tellement de choses. Il se disait content de le revoir aussi. À cela, l’ingénieur sentit cette affreuse, affreuse chaleur dans son ventre. Une plaie à elle seule. Tellement agréable, tellement grisante. Tellement affolante. Parce qu’alors, tout le reste disparaissait à l’arrière-plan et James se sentait pousser des ailes. S’il s’envolait maintenant… La chute serait douloureuse et mortelle, il le savait. Malgré tout, c’était plus fort que lui. Marvin était heureux de le revoir, malgré la façon plus que froide dont ils s’étaient séparés ce matin-là. Il n’était peut-être pas le seul à repenser à cette nuit, à vouloir plus que juste un soir. “Est-ce que tu fais quelque chose ce…” Sa question mourut, violemment assassinée par la réalité, avant qu’il n’ait le temps de la poser. Ce qu’il craignait le plus au monde à cet instant se produisit et la voix si douce et si joyeuse de Maya vint l’interrompre trop brusquement. Aussitôt, James tomba de ce petit nuage qui l’avait transporté jusque là. Il se tendit immédiatement et dut lutter pour que son sourire, désormais figé, reste en place. “Maya ! Hey !” souffla-t-il, sa voix tremblante au travers de sa gorge nouée. Ses pensées s’enchainèrent au rythme désormais insoutenable des battements de son coeur. Il ne fallait surtout pas qu’elle sache, qu’elle comprenne ce qui se passait ici entre eux. Et lui… Oh s’il savait… James se devait d’intervenir, de trouver un mensonge assez habile pour que personne ne soit blessé. Il ne trouvait rien et ce fut finalement Marvin qui parvint l’incroyable miracle de s’expliquer. James releva ses yeux écarquillés sur lui. Il mentait avec presque assez d’aplomb pour qu’on le croit sans réfléchir. Mais pourquoi ? Quel intérêt avait-il à mentir sur leur rencontre, lui ? C’était étonnamment blessant, à vrai dire. Avait-il honte ? Non, probablement pas. Une partie encore vaguement consciente de James savait que ça n’avait rien à voir avec ça. Il n’en était pas moins aussi soulagé que blessé. “Oui, exactement.” lâcha-t-il, détournant difficilement son regard de Marvin pour le poser sur sa femme. “On discutait… tu sais, informatique. Rien de très passionnant. Désolé, j’en ai oublié de te ramener ton assiette.” Il tenta un sourire assez piteux, tellement différent de celui qu’il offrait encore à l’homme un instant plus tôt. La culpabilité vint se mêler à la fête déjà bruyante de toutes ces émotions insoutenables quand il eut le malheur de recroiser le regard de Marvin. “Maya est… ma femme.” souffla-t-il, car c’était ce qu’il devait faire, n’est-ce pas ? Les présenter, agir comme n’importe qui l’aurait fait et s’assurer, aussi, que le mot de trop n’échapperait pas à l’homme. Sa main se souleva légèrement, comme s’il s’apprêtait à la poser sur la jeune femme, mais retomba dans le vide bien longtemps avant de l’effleurer. Ce désir fulgurant de disparaître tout à coup le reprit à la gorge. Et pourtant, l’idée d’en rester là, de ne pas pouvoir s’expliquer, le tuait encore plus. “On pourrait continuer cette conversation plus tard, si tu veux ?” essaya-t-il.